Et si MG avait trouvé la bonne formule pour séduire les amateurs de cabriolets ?
Que vaut le MG Cyberster électrique face à l’iconique Porsche 911 cabriolet ici dans sa version 997 4S de 2010 ?
A l’occasion des eTrophées organisés par l’AMAM (Association des Médias Auto et Moto), j’ai pu me glisser derrière le volant d’une nouveauté intrigante : le MG Cyberster, un roadster 100% électrique bien dans l’esprit des réalisations passées de la mythique firme anglaise aujourd’hui chinoise !
Un nouveau roadster, ce n’est déjà pas très courant dans la production actuelle. Qui plus est électrique ! Raison de plus pour l’étudier sous toutes les coutures et se faire un avis : est-ce que cabriolet et propulsion électrique se marient bien ? Est-ce que passion et raison peuvent s’entendre au quotidien ?
Pour avoir créé un magazine dédié aux cabriolets et à l’art de vivre qui va avec au début des années 2000 et rouler au quotidien la tête à l’air libre, j’étais curieux et pour ne pas dire perplexe quant à la cible visée ! Est-ce que ce roadster, joliment dessiné, peut s’imposer sur une niche de plus en plus abandonnée par les constructeurs généralistes comme par les spécialistes d’ailleurs ? Est-ce qu’il existe encore une clientèle pour ce type de modèle, a fortiori quand celui-ci est électrique ? Après quelques kilomètres à son volant, sous une météo nuageuse mais agréable, j’ai été en partie séduit. Mais je voulais en avoir le cœur net : est-ce qu’un cabriolet électrique est un bon compagnon de route pour se balader sous le soleil, le coude à la portière et cheveux au vent ? Et pour pimenter le débat, j’avais envie de le confronter à l’une des références en la matière, l’iconique Porsche 911 dans sa version 997 4S car relativement proche en puissance (385 vs 340 pour le MG). Et en ce qui concerne les tarifs, on est sensiblement dans les mêmes eaux, autour des 65 000 € pour les 2 modèles.
Rendez-vous au Croisic !
Donc, en ce chaud mois de juin, j’ai fixé rendez-vous à une consoeur journaliste, spécialisée dans les essais de voitures électriques. Elle avait prévu de faire un essai longue distance du Cyberster, autant lui proposer de venir s’oxygéner en Bretagne quelques jours. Habituée à parcourir la France et à se brancher aux bornes électriques, elle a effectué le trajet jusqu’au Croisic et la région des Marais Salants de Guérande depuis la banlieue parisienne. Après une prise en mains rapide et un branchement nocturne pour atteindre les 100% de batterie, elle a attaqué l’autoroute A11 en direction de Nantes et la presqu’île guérandaise ! Et là, son avis est sans appel : le Cyberster est bruyant ! Trop pour une voiture électrique ! La faute en incombe aux remous aérodynamiques et aux pneumatiques sonores. Et niveau confort, c’est ferme, dans des sièges qui ne maintiennent pas toujours très bien. En effet, lors de ma prise en mains du véhicule, j’avais noté ce souci avec les sièges. Visuellement agréables, ils sont en fait inconfortables sur longs trajets. Dommage car la position de conduite est dans les standards, plutôt bonne même si elle est un peu haute.
En revanche, et là c’est un gros point négatif de l’auto, les écrans tout numériques sont invisibles dès que le soleil rentre dans l’habitacle ouvert et surtout, pour ceux qui conduisent avec des lunettes polarisées, ils sont illisibles ! J’ai noté ce phénomène à de multiples reprises dans les véhicules modernes équipées de grands écrans et de tablettes. C’est encore plus vrai pour ceux qui disposent de la visée tête haute sur le pare-brise. Avec des lunettes polarisées, les reflets sont gommés, ce qui efface les projections sur le pare-brise. Autre point critique, l’ergonomie et l’interface homme-machine, qui sont loin d’être des modèles de clarté. Notamment le volant qui cache les écrans ou encore le besoin d’aller chercher dans des sous-menus certains réglages. Face à la rigueur allemande de la Porsche, la comparaison est dure pour le MG, même si la planche de bord de cette génération de 911 a pris un coup de vieux !
Pour arriver jusqu’à Guérande, le Cyberster a eu besoin de deux recharges, ce qui a augmenté le temps de trajet de plus d’une heure par rapport au temps de trajet de la 911. Je précise que ces trajets ont été réalisés aux vitesses légales et capote fermée !
Cette différence de temps n’a que peu d’importance quand on voyage en cabriolet, l’essentiel étant le plaisir pris à bord, même sur autoroute. Et, dès que l’on sort des voies rapides, il suffit d’appuyer sur un bouton, sous la limite des 50 km/h pour les deux voitures, pour se retrouver cheveux au vent et profiter des odeurs de la campagne et du pépiement des oiseaux.
Donc, vous êtes en train de vous dire qu’il n’y a pas de différences entre un cabriolet thermique et son équivalent électrique ? A dire vrai, peu si on reste parfaitement objectif !
« Un cabriolet, ça doit faire du bruit ! »
Sauf que le subjectif reprend vite le dessus ! Notamment en ce qui concerne un élément essentiel en cabriolet : l’ouïe ! Elle participe au plaisir de conduite quand on est décapoté. Même ma consoeur, pourtant électro-convaincue, n’a pu s’empêcher d’apprécier les vocalises du flat 6 allemand quand elle suivait la Porsche. Cet élément du « monde d’hier » participe toujours à la passion de l’automobile que les jeunes vouent à cette dernière ! Il suffisait d’entendre les commentaires lors de nos passages dans les villages : « Hey, regarde la 911 ! Oh, magnifique ! Et quel bruit ! » Et bien d’autres que je vous laisse imaginer !
Mais, le MG n’était pas en reste, loin s’en faut ! Les gamins sur son passage s’exclamaient : « Regarde l’Aston ! Elle est top ! J’adore la couleur ! » Et puis : « Tiens, elle ne fait pas de bruit ! Ce n’est pas une Aston mais une MG électrique ! ». Et là, patatras ! Sur le parking durant la séance photos, alors qu’ils trouvaient la voiture magnifique et originale avec ses portes en élytre déployées, les plus anciens n’ont même pas écouté les arguments des bienfaits de ce type de motorisation, pour assener sur un ton péremptoire : « un cabriolet, ça doit faire du bruit ! ». Sauf qu’en électrique, on apprécie encore plus les bruits de la nature, le chants des oiseaux, le bruissement du vent dans les arbres mais également les klaxons et le brouhaha dans les villes.
Prendre son temps
Alors, est-ce que les deux mondes sont irréconciliables ? Non bien sûr ! Question de génération ! Et aussi d’une certaine façon de rouler ! Avec ce roadster électrique, on prend un peu plus le temps de vivre, pour augmenter l’autonomie en roulant moins vite. Ou par exemple, déjeuner plus longuement pour recharger. Avec une batterie NMC de 77 kWh, une puissance de 250 kW (soit 340 ch) et une puissance maxi de recharge en courant continu de 144 kW, le Cyberster est capable de recharger de 10 à 80% en 38 minutes, ce qui veut dire un arrêt de près de trois quart d’heure minimum ! Et recommencer l’opération 200 à 220 kms plus loin !
J’avoue que la comparaison face à la 911 est cruelle puisque le trajet Paris – La Baule est avalé d’une traite, à la moyenne de 8,7 l aux 100 kms et qu’il reste encore 200 kilomètres d’autonomie en arrivant ! Le 6 cylindres allemand à injection directe, associé à la boîte de vitesses PDK est un modèle de sobriété sur autoroute à allure régulière. Avaler les kilomètres à son volant est un vrai régal. Les remous aérodynamiques sont quasi inexistants et l’insonorisation de la capote fait merveille. Quant à la position de conduite, elle est parfaite, surtout quand on dispose des sièges sport aux multiples réglages.
Sur certains points, MG doit absolument faire évoluer son Cyberster si la marque veut séduire un public européen ! Notamment en termes de confort ou de comportement routier, surtout si la route n’est pas parfaitement lisse. En effet, sur un billard, le Cyberster montre quelques belles qualités dynamiques, bien aidées par un centre de gravité bas et des batteries incluses dans le châssis. Mais dès que le bitume est dégradé et que la route n’est pas plane, les suspensions sont à la peine, vraiment pas aidées par le poids de la voiture (2 tonnes). Bondir de virages en virages ne lui pose pas de soucis à condition de la maintenir fermement sur sa trajectoire et anticiper les réactions. Attention aussi à ne pas accélérer trop fort, le couple instantané du moteur électrique peut surprendre et vous faire arriver plus vite que vous le pensiez sur un virage. Heureusement que le freinage confié à Brembo et les ADAS sont bien présents. Ils le sont d’ailleurs beaucoup trop ! Ils retirent au MG ce petit côté joueur qui lui fait défaut. On est pas du tout au volant d’une Mazda MX-5, référence pour les amateurs de roadster, ni dans une BMW Z4 ou Porsche Boxster plus premiums. Face au Cyberster, la 911 malgré ses 15 ans d’âge et ses plus de 100 000 kms est un vélo, surtout dès que l’on actionne le mode Sport ! On prend nettement plus de plaisir à son volant ! Bien calé dans le baquet, elle enchaîne les virages avec une précision et une facilité déconcertantes. Et surtout, quel pied de monter et descendre les rapports avec les palettes au volant ! Ce geste plaisir inexistant sur le Cyberster lui fait grandement défaut !
Mais alors, que choisir ?
Après cette prise en mains du seul roadster électrique sur le marché (pour l’instant et en attendant le nouveau Porsche Boxster EV), il est temps de répondre aux nombreuses interrogations :
Oui, cabriolet et propulsion électrique se marient bien aujourd’hui. Mais les constructeurs, au cas où il y aurait d’autres modèles dans les cartons, doivent limiter le poids au profit du plaisir de conduite.
Oui, il est possible de partir en roadtrip avec ce MG et avaler des kilomètres le coude à la portière et cheveux au vent, à condition de prendre son temps et de bien planifier ses déplacements longue distance (presque comme toutes les voitures électriques actuelles).
Oui, la passion et la raison font bon ménage dans ce MG Cyberster doté d’un design spectaculaire bien mis en valeur par l’originalité des portes en élytre.
Oui, le MG peut s’imposer auprès d’une certaine clientèle, friande de cabriolet ou même curieuse de découvrir la propulsion électrique. Mais, pour s’imposer encore plus largement en Europe, MG doit absolument gommer les défauts de son modèle : suspension trop souple et comportement sur routes dégradées, confort des sièges, ergonomie et interface homme-machine.
Enfin, niveau tarifs, le rapport prix/prestations se montre un peu élevé surtout si on compare avec des modèles d’occasion plus abordables. La solution dans ce cas-là pourrait passer par la LOA ou la LLD.
Pour un premier jet, on peut considérer que le but est atteint en matière d’image et de notoriété même si, face aux références thermiques que sont les Mazda MX-5, BMW Z4, Porsche Boxster et 911 ou autres, le MG a encore tout à prouver ! Et surtout, il doit convaincre les plus réfractaires à l’électrique. Pour cela, la seule solution consiste à faire essayer la voiture au client.
En ce qui me concerne, je conserve la 911 (merci VM Automobiles à Gif sur Yvette, elle est parfaite !) mais je ne dirais pas non à un cabriolet électrique dans le futur. C’est peut-être encore un peu tôt pour changer de mode de propulsion !
Au présent, le passé simple supplante encore le futur antérieur ! Mais pour combien de temps ? Rendez-vous dans dix ans ?